Viticulture et biodiversité: un débat foisonnant chez Hennessy à Cognac

Mardi 24 mai 2022, Terre de vins et la Caisse d’Epargne Aquitaine Poitou-Charentes organisaient une conférence chez le leader mondial du cognac. Parmi les invités : Mathilde Boisseau, Marc-André Selosse et Gilles Boeuf.

Ce fut un débat HVE, à haute valeur éducative pour une centaine de viticulteurs présents. Thème abordé : « Biodiversité, de l’enjeu à l’opportunité  : Le vignoble en première ligne, pourquoi et comment agir ». La conférence était organisée par Terre de vins, la Caisse d’Epargne Aquitaine Poitou-Charentes et le négociant leader mondial du cognac, la Maison Hennessy.

Sur scène, Mathilde Boisseau, Directrice Vigne et Vin de la Maison Hennessy et deux scientifiques de renom : les biologistes Marc-André Selosse et Gilles Boeuf. Le premier, professeur au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), est un spécialiste des sols. Le second, enseignant à la Sorbonne, ancien président du MNHM, est océanographe. Tous deux sont de fervents défenseurs du vivant, persuadés qu’il faut « arrêter de concevoir la nature comme une ressource exploitable à l’infini »

Nulle injonction

« La viticulture, c’est 3 % de la surface agricole utile de notre pays mais plus de 20 % des intrants utilisés en France », a souligné Marc-André Selosse, ajoutant que l’on pouvait encore « redresser la barre […] et ne plus abîmer la planète de nos enfants ».

« L’humain a oublié qu’il appartenait au vivant ; qu’en l’agressant, il s’agressait lui-même », a enchaîné Gilles Boeuf, précisant qu’il avait le plus grand respect pour le métier de viticulteur et « cette plante extraordinaire qu’est la vigne ».

Les scientifiques ont appelé à de nouvelles pratiques : abandon du labour, réduction drastique des pesticides, recours à l’agroécologie, expérimentation de cépages plus résistants aux maladies. Nulle injonction dans ces suggestions : « La science n’a pas de réponse toute faite » (Selosse), « elle n’est pas une opinion » (Boeuf). En d’autres termes : l’agriculture n’est pas un problème, elle constitue une partie de la solution.

L’agronome et œnologue Mathilde Boisseau, directrice Vigne et Vin de la Maison Hennessy, a expliqué comment le n°1 du cognac s’engageait. Elle a cité l’abandon progressif des herbicides, une expérience d’agroforesterie sur le domaine expérimental de La Bataille, en Charente, et le programme international « Forest Destination », avec la régénération de 50 000 hectares de forêts dans le monde à l’horizon 2030.

Le temps long

« Cela fait sept ans que je travaille en Charente. J’ai vu le vignoble du cognac changer, les interrangs s’enherber, les couverts végétaux se généraliser. Oui, les 1 600 viticulteurs partenaires d’Hennessy améliorent leurs pratiques et sont prêts à changer. Mais ils ont besoin d’accompagnement et sont en demande de solutions. Nous avons besoin de la mobilisation de toute la filière et de la communauté scientifique », a déclaré Mme Boisseau.

Rodolphe Wartel, directeur de Terre de vins, animait le débat, parfois ardu mais toujours accessible. Il a réussi à diriger et replacer les échanges dans leur réalité locale : le vignoble charentais, dont la production d’eaux-de-vie s’inscrit dans le temps long. Ici, on ne confond pas vitesse et précipitation. On travaille pour les générations futures. Face à l’urgence environnementale, c’est sans doute une chance.

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