Dans la foulée de la signature d’un partenariat avec California Wines, l’organisme de défense et de promotion des vins californiens, l’Union de la Sommellerie Française (UDSF) organisait la semaine dernière une masterclass parisienne autour de quelques talentueux domaines américains. Un signal destiné à montrer que la « French Sommellerie » s’ouvre de plus en plus au monde.
Ça bouge à la tête de la sommellerie française, et on peut même dire que les horizons s’ouvrent en grand. Six mois après la nomination de Fabrice Sommier au poste de président de l’UDSF, le conseil d’administration du 16 octobre venait entériner quelques nouveautés pour marquer le changement de gouvernance, se traduisant par un nouveau Bureau à la tête de l’union (Florent Martin au poste de secrétaire général, Caroline Furstoss secrétaire adjointe, Xavier Thuizat trésorier notamment), par l’instauration d’une Équipe de France de sommellerie (composée de Gaëtan Bouvier, Romain Iltis, Pascaline Lepeltier, Florent Martin et Philippe Troussard) destinée à mieux préparer les grands concours internationaux à venir, par une nouvelle stratégie de communication axée sur une présence accrue sur les réseaux sociaux, et enfin par la signature de nouveaux partenariats entre l’UDSF et des structures telles que l’Union des Grands Crus de Bordeaux, le Champagne Castelnau, l’Arbre à Café et… California Wines.
Une ouverture au (nouveau) monde pour les sommeliers français
C’est la première fois que la sommellerie française signe un partenariat officiel avec une entité représentant un vignoble étranger, et quel vignoble ! Pour Fabrice Sommier, « cette signature est une magnifique opportunité d’ouvrir de nouveaux horizons à nos sommeliers, de leur donner à découvrir une région majeure du Nouveau Monde qui produit des vins d’exception. Il faut plus que jamais s’ouvrir au monde entier dans notre profession, goûter ce qui se fait ailleurs. C’est aussi une façon de faire mieux connaître le savoir-faire de la sommellerie française aux vignerons californiens, bref dans un monde du vin qui se ‘mondialise’ de plus en plus, c’est un partenariat hautement symbolique ».
Pour entériner ce partenariat de la plus belle des façons, l’UDSF organisait la semaine dernière à Paris, dans le cadre de l’hôtel Intercontinental – Paris Le Grand, une masterclass destinée aux professionnels (majoritairement des sommeliers) en présence de quatre domaines californiens, situés en Napa et Sonoma Valley. Ces deux régions sont, bien entendu, les plus célèbres et emblématiques d’un vignoble californien extrêmement étendu, puisqu’il s’étire de la région de San Diego, près de la frontière mexicaine, jusqu’aux confins de l’Oregon, en passant par la région de Paso Robles à mi-chemin entre Los Angeles et San Francisco. L’ensemble recouvre plus de 200 000 hectares, répartis en six sous-régions et quelque 149 « American Viticultural Areas » (AVAs), zones viticoles aux caractéristiques géographiques spécifiques. Bref, la Californie est un poids lourd de la viticulture américaine et mondiale, comme se plaisait à le rappeler en préambule la journaliste Deborah Parker Wong, qui animait cette masterclass.
Les quatre personnalités représentant le vignoble californien étaient :
Cathy Corison, propriétaire et viticultrice de Corison Winery, et notamment du vignoble de Kronos, un grand terroir d’un peu plus de 3 hectares en Napa Valley. Cathy a été la première femme viticultrice/propriétaire dans la région et s’est imposée comme une référence des grands cabernets sauvignons.
Ted Lemon, propriétaire et vinificateur de Littorai Wines. Formé à l’Université de Dijon au début des années 1980, Ted est le premier Américain à avoir été embauché comme vinificateur en Bourgogne, au Domaine Guy Roulot à Meursault. Parlant un français plus que parfait, il a créé Littorai dans le comté de Sonoma en 1993 et sa philosophie de vinification repose sur son engagement en faveur d’une agriculture « régénératrice ».
Alan Ramey, copropriétaire de Ramey Wine Cellars, fondée dans le comté de Sonoma par son père David en 1996. Ce dernier avait bénéficié d’une solide expérience dans le Bordelaias au côté de Jean-Claude Berrouet à Pétrus (Pomerol). Son fils Alan poursuit son œuvre et manie, lui aussi, un français remarquable.
Edouard Baijot, Master of Wine, est un Français natif de Reims, qui a intégré le monde du vin en 2002 lorsqu’il a rejoint le géant E & J Gallo Winery en France. Edouard est devenu Master of Wine en 2019 et est maintenant Directeur Fine Wine pour la grande maison Louis M. Martini Winery en Napa Valley.
Huit vins, deux de chaque domaine, étaient proposés en dégustation : deux blancs de Sonoma 100% chardonnay de Ramey Wine Cellars et de Littorai, deux rouges de Sonoma 100% pinot noir de Ramey Wine Cellars et de Littorai, puis quatre autres rouges, trois de Napa et un de Sonoma, 100% cabernet-sauvignon, de Corison Winery et de Louis M. Martini Winery. Voici nos coups de cœur sur cette dégustation :
– Littorai, B.A. Thieriot Chardonnay, Sonoma Coast 2021 : pour Ted Lemon, « le chardonnay, plus encore que le pinot noir, est le grand cépage de terroir, un exceptionnel transmetteur de lieu ». Illustration parfaite de cette conviction avec ce magnifique blanc en biodynamie, ciselé, tactile, à l’aromatique très pure, au profil élancé et signé par de fines notes salines.
– Ramey Wine Cellard, Pinot Noir, Russian River Valley 2019 : un assemblage de quatre lieux différents pour un pinot noir qui combine une cetaine délicatesse dans sa couleur comme dans sa texture tannique, et une concentration maîtrisée, le fruit rouge et noir se parant d’un côté « crispy », roulant, juteux et vivace. À la fois désaltérant et gourmand.
– Corison, Kronos Vineyard Cabernet Sauvignon, Napa Valley 2001 (magnum) : en mettant le nez dans le verre, les notes de graphite et de cèdre, le léger fumé mentholé, nous feraient presque pencher pour un grand saint-julien. On est chez Cathy Corison, en Napa Valley. Ce millésime 2001 nous démontre le potentiel de garde des cabernets californiens nés sur de grands terroirs, et l’extrême savoir-faire d’une vigneronne qui « vit » son vignoble. Voici un vin au profil traçant, propulsif, dont le jus droit et séveux garde une savoureuse vigueur tout en déclinant de passionnantes premières notes d’évolution (boîte à tabac, âtre, sous-bois, fruit confit). Finale longue et vibrante, c’est un très grand vin, et le 2019 du même terroir dégusté dans la foulée nous confirme la force de ce lieu.
– Louis M. Martini, Monte Rosso Cabernet Sauvignon, Sonoma Valley 2012 : ce très vieux vignoble (certaines parcelles de zinfandel datent des années 1890, et le cabernet des années 1940) donne naissance à des vins en équilibre entre Nouveau Monde et Vieux Monde. Il s’agit ici d’un assemblage 93% cabernet-sauvignon 7% petit verdot, au profil sanguin, presque ferreux en bouche, rehaussé d’une pointe de mine de crayon, sur une ligne de crête entre opulence et tension. Concentré, dense et vif.
Pour en savoir plus sur les vins californiens : discovercaliforniawines.com
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