Ruinart conforte son expérience Blanc Singulier

La maison rémoise installe dans le temps sa cuvée expérimentale Blanc Singulier avec le millésime 2019, un champagne imaginé en réponse au dérèglement climatique et qui pourrait bien devenir le blanc de blancs du futur.

La présentation de cette nouvelle cuvée était corrélée à la délocalisation cette semaine du restaurant pas-de-calaisien la Grenouillère dans un lieu éphémère parisien. Le chef doublement étoilé Alexandre Gauthier avait déménagé casseroles et fourneaux dans un garage désaffecté du 8e arrondissement de Paris pour quelques jours. La Grenouillère au bord des marais de Madelaine-sous-Montreuil, sinistrée lors les dernières inondations de mars, a dû fermer pendant quelques semaines, sans doute jusqu’en juin. En attendant la réouverture, le garage mis en scène par Julien Gosselin accueillait la Maison Ruinart qui avait tenu à soutenir le chef en ces temps difficiles. Frédéric Panaiotis a profité de l’occasion pour faire un point sur le millésime 2003 : « Il a été vite rentré à cause de l’humidité et beaucoup trié. Les chardonnays s’en sont mieux sortis que les pinots mais au global, on a récupéré un beau volume de récolte avec des grappes de plus de 30 % en poids. D’où une certaine dilution, et en tout cas un manque de concentration » : il n’y aura donc pas de Dom Ruinart millésimé ni de Blanc Singulier en 23. « Dans les années 80, il n’était pas rare de devoir sauter deux ans pour millésimer. Aujourd’hui, nous avons plus d’années ‘millésimables’ ; il est donc plus facile de renoncer à une vendange ». Ainsi, le chef de caves a présenté cette semaine le Blanc Singulier 2019 en attendant le Dom Ruinart Blanc de blancs 2013 qui sortira cet été.

2019, un immense millésime
Le Blanc Singulier avait été lancé en prototype avec le 2017 (en « concept car » selon les termes du chef de caves Frédéric Panaiotis), uniquement vendu à la boutique de Reims de Ruinart. Le 2018, plus tendu, avec 20% de réserve perpétuelle dont une partie conservée en foudres, une révolution pour la Maison, a été le premier véritable millésime, lancé en 2023. Et voilà le 2019, un champagne riche, intense, charnu et croquant, sur des arômes de fruits blancs bien mûrs (poire, nectarine), de notes d’agrumes, de citron confit et de fleurs blanches (chèvrefeuille), une trame tendue délicatement crayeuse et une finale légèrement fumée-épicée. Il a été élaboré avec 23% de vins de réserve (depuis 2016 élevé pour moitié en foudres), vinifié avec fermentation malolactique avant trois ans de vieillissement. « Un immense millésime, toujours en non dosé même si ça ne sera pas la règle ». 2019 était une année très chaude avec un été sec, des épisodes caniculaires et le cycle le plus court de la vigne (81 jours) enregistré depuis 2003.  « Ce qui a débouché sur des maturités plus poussées, idéales pour élaborer un Blanc Singulier car nous avons bénéficié d’un choix plus large de cuves pour l’assemblage, en provenance de la Montagne de Reims (Sillery, Taissy), de la Côte des Blancs (Bergères-les-Vertus, Cramant), de la vallée du Petit Morin et du Cézannais. C’est une très grande année, entre la fraîcheur du 2017 et la richesse et la complexité du 2018. » 

Panaiotis Frédéric chef de caves de la Maison Ruinart ©F.Hermine

Une réponse au dérèglement climatique
Frédéric Panaiotis a imaginé cette cuvée en réponse au dérèglement climatique en Champagne : Des gelées noires plus fréquentes avec une descente d’air froid à -6-7°, une légère tendance au débourrement plutôt début avril mais surtout un cycle accéléré au printemps, des étés plus secs, des vendanges raccourcies démarrant de plus en plus tôt (début septembre en 2023). « Cette année, j’ai même demandé à mes équipes de prendre leurs vacances en juillet car nous pourrions devoir vendanger à la mi-août ». Ce qui implique un décalage de maturité, une montée des sucres et une baisse de l’acidité qui convient mieux au chardonnay, plus flexible, qu’aux pinots qui pourraient être en danger à l’avenir avec le réchauffement, surtout le meunier ». Frédéric Panaiotis se base pour ce Blanc Singulier sur l’indice de Huglin qui tient compte de différents paramètres bioclimatiques (températures moyennes, maximales, longueur du jour…) pour établir le potentiel de sucre des cépages. « Les années que l’on considérait comme chaudes jusqu’au début du siècle ont été dépassées depuis longtemps et on n’a plus de sous-maturité en Champagne.  On travaille donc pour ce blanc Singulier 100 % chardonnay avec une expression plus mûre et thiolée du chardonnay, une acidité plus douce et à dosage minimal tout en jouant sur les vins de réserve pour conserver la fraîcheur signature de la Maison. Cette cuvée est sans doute le blanc de blancs du futur ».

Blanc Singulier Edition 19 (110 €) : Servir frais à 10-12°C avec un carpaccio de bar et une sauce aux agrumes et safran, un bavarois aux nectarines,

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