L’AOC Bourgogne cherche toujours ses frontières

Plus d’un an après la manifestation des viticulteurs bourguignons devant le siège de l’Inao, le dossier de la délimitation de l’AOC Bourgogne a connu peu d’avancées. Dans ce débat, une question cristallise toujours les tensions : celle de la frontière entre Bourgogne et Beaujolais, et ses conséquences économiques.

Où s’arrête l’AOC Bourgogne ? La question peut paraître simple. Pourtant, plusieurs générations de vignerons et de juristes s’y sont cassé les dents. En 1937, le décret d’appellation originel effectue un premier tracé très large, englobant des centaines de communes, tout en prévoyant de l’affiner par la suite, en supprimant les aires qui ne répondent pas à certains critères techniques et historiques. Chose faite dans le cœur de la Bourgogne. Mais jamais dans le Chablisien, ni dans le Beaujolais.

Historiquement parlant, le Beaujolais fait partie de la “Grande Bourgogne”, d’où son intégration au sein de l’AOC Bourgogne lors de sa création en 1937.

Une situation de flou juridique dont hérite aujourd’hui l’AOC Bourgogne. Entendez ici « Bourgogne générique », soit le premier échelon dans la hiérarchie des appellations bourguignonnes. Car dans ce dossier, les « villages », « Premiers crus » et « Grands crus » ne sont pas concernés. Du moins pas directement : à travers cette AOC régionale, c’est l’image de tout un vignoble qui est en jeu.

Un nouveau projet fin 2021

Ainsi dans ce dossier, chaque mouvement peut mettre le feu aux poudres. Ce qui est arrivé début 2020, quand un groupe d’experts a proposé à l’Inao, qui gère les appellations françaises, d’exclure le Chablisien de l’aire géographique des Bourgognes, tout en conservant 43 communes du Beaujolais. Une « mise en danger » de l’AOC pour nombre de ses viticulteurs. Le 6 février, 400 d’entre-eux manifestent devant le siège de l’Inao. Christian Paly, président du comité vins, souhaite alors les rassurer : il n’aurait « jamais entériné une sortie de secteurs aussi emblématiques, et ne le fera pas. »

Ce qu’il confirme aujourd’hui. « Il s’agissait d’une piste de travail, que l’on aurait jamais validée politiquement ». Et d’annoncer : « un nouveau projet, incluant le Chablisien et réduisant l’aire du Beaujolais à 48 communes, devrait être proposé d’ici la fin de l’année 2021″. Mais cette perspective peine à convaincre le Syndicat des Bourgognes, qui représente les viticulteurs de l’AOC. Si cette fois la question du Chablisien est réglée, reste la problématique du Beaujolais. »Pour le consommateur, il y a deux identités fortes que sont Bourgogne et Beaujolais. Si l’on mélange les deux, un problème d’image s’ensuit. La notion même d’origine contrôlée est remise en cause», estime Guillaume Willette, directeur du syndicat, qui craint «des conséquences économiques pour l’ensemble de la Bourgogne ».

Sur ce point, Christian Paly insiste, « nous appliquons des critères objectifs, dans le cadre de procédures précises. Nous ne pouvons pas faire de délimitation, où qu’elle soit, à la tête du client. Même si nous avons conscience que nous devons pas faire n’importe quoi en matière économique. »

Quels critères pour délimiter une AOC ?
– Des critères techniques, comme la géologie ou le climat
– Des critères humains, parmi lesquels l’usage de l’appellation, c’est à dire sa revendication actuelle et historique. C’est surtout sur ce point que l’AOC Bourgogne divise.

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