Le château Lafite Rothschild, emblématique Premier Grand Cru Classé 1855, dévoile une nouvelle cuvée issue d’un parcellaire dédié. Baptisée Anseillan, du nom du lieu-dit où elle prend naissance, elle se veut “une nouvelle expression du terroir de Lafite” pour Saskia de Rothschild et ses équipes.
“On ne sort pas de nouvelle cuvée très souvent à Lafite Rothschild. La dernière fois cela devait être à la fin du XIXème siècle avec Carruades, notre second vin. C’est donc un petit événement”, sourit Eric Kohler, directeur technique du Premier Grand Cru Classé 1855 à Pauillac. La nouvelle cuvée dont il parle est le fruit de plusieurs années de réflexion et, pour paraphraser Saskia de Rothschild, “une nouvelle expression du terroir de Lafite”. Anseillan, c’est son nom, vient d’un lieu-dit et d’un hameau du XVIème siècle acquis par la famille dans les années 1970. Pendant des années, ces terroirs singuliers, composés de graves, d’argiles et de calcaires, à l’encépagement dominé par le merlot, donnaient naissance à des raisins qui pouvaient aller aussi bien aller dans du Lafite que dans du Carruades. Puis, en 2014, est apparue l’idée d’en tirer un vin à part entière, avec son caractère propre. Pas un “troisième vin” mais une authentique cuvée, plus accessible en style comme en prix, tout en conservant “l’esprit Lafite”.
Suite à un travail de fond mené par les équipes du château, enrichies depuis 2017 par l’arrivée de Louis Caillard au poste de chef de culture, d’abord sur l’approche viticole (débouchant sur un gros effort de restructuration d’une grosse partie des 15 hectares d’Anseillan, visant à optimiser l’encépagement et le matériel végétal) puis sur les assemblages, c’est sur le millésime 2018 que tout le monde est tombé d’accord.
Voici donc une première mouture d’Anseillan, récemment mise en marché, qui se présente aux amateurs du monde entier : “notre objectif est de placer ce vin, au prix accessible*, sur les tables des restaurants du monde entier qui ont parfois oublié à quel point il est bon de partager une bouteille de bordeaux”, souligne Saskia de Rothschild. Et de fait, ce vin, déjà “prêt à boire” mais non dénué de potentiel de garde, a tout pour séduire la restauration. Le millésime 2018, assemblage de merlot (48%), cabernet sauvignon (39%) et petit verdot (3%), présete une belle gourmandise de crème de cassis, tout en chair tendre et enrobée, le tout rehaussé par un joli grain de tannins et une rectitude qui nous rappelle que l’on est bien dans le Médoc, et pas dans n’importe quel coin du Médoc.
Pour l’instant, ce 2018 est un coup d’essai concluant, mais loin d’être un aboutissement : “nous avons la chance d’avoir un beau terrain de jeu avec Anseillan, le genre de terroir qui est favorisé par les effets du changement climatique, nous allons donc continuer d’explorer et d’apprendre”, précisent Eric Kohler et Louis Caillard, qui rappellent que la restructuration du vignoble ne portera – littéralement – ses fruits que dans quelques années, que les assemblages peuvent évoluer d’un millésime sur l’autre, et qu’on ne s’interdit pas de faire des essais d’élevages en amphores. De fait, les deux millésimes suivants (qui sont en bouteille mais ne sont pas encore disponibles) se distinguent aussi bien dans leur assemblage (85% merlot 15% cabernet en 2019 ; deux-tiers un-tiers en 2020) que dans leur style, avec une prime à la “buvabilité” pour le 2019 qui devrait faire de nombreux adeptes lorsqu’il sera mis en marché l’année prochaine. Pour le 2020, il faudra attendre 2024 – le temps qu’il fonde un peu de sa robustesse et de son opulence pour ravir les convives autour d’une belle tablée, comme il se doit.
*Le vin doit être proposé entre 90 et 100 € sur table, en moyenne.
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