Petit à petit, les vignerons font leur nid

En déployant 300 nichoirs à mésanges et gîtes à chauve-souris dans le vignoble, le syndicat des Costières de Nîmes entend favoriser la biodiversité dans le cadre de son plan agro-environnemental, et montrer aux consommateurs que les vignerons peuvent avoir un impact positif sur la nature.  

Bellegarde, dans le Gard, en plein cœur des Costières de Nîmes. Sur cette terre argileuse au rouge flamboyant, les galets roulés du Domaine Pierre Teissonnière n’ont rien à envier à l’imposant voisin de Châteauneuf-du-Pape. Ce jour-là, l’effervescence est palpable sur cette parcelle de syrah où les vignerons sont partie prenante dans le déploiement de nichoirs à mésanges et de gîtes à chauve-souris dans leur vignoble. « Le projet, mené par le syndicat, nous a beaucoup plu, explique Romain Teissonnière. On est déjà en bio depuis plusieurs années, on plante des arbres et des haies, on couvre nos sols à 50%, on a tissé des partenariats avec des bergers pour désherber, il nous paraissait pertinent d’aller encore plus loin. » Dans le cadre du déploiement de son plan agro-environnemental 2023-2024 en partenariat avec l’Agence de l’eau, le Syndicat des Costières de Nîmes a en effet lancé une vaste expérimentation de pose de 300 nichoirs et gîtes, via une quinzaine de vignerons, pour combattre les nuisibles de la vigne (vers de la grappe et citadelle dorée principalement). « C’est un pas de plus vers le changement progressif des pratiques et l’implication de nos vignerons en faveur de la biodiversité », explique Bernard Angelras, le président de l’appellation. Pour rappel, 80% des exploitations des Costières de Nîmes sont engagées dans des certifications environnementales. A ses côtés, Brice le Maire, de la société Agrinichoirs, n’est plus surpris par ces prises de position. « On en a déjà installé au moins 15 000 dans les vignes et les vergers de France, reconnaît-il. Et les résultats sont bons. On estime le taux d’occupation à 60% au bout de 3 ans avec une densité d’implantation de 7 abris par hectare pour la vigne, contre 10 à 15 pour les vergers. »

Un couple de mésanges peut avaler 18 000 insectes sur 20 jours

La pose des nichoirs (en roseau de Camargue) ou gîtes (en bois d’Aveyron) a pour intérêt de favoriser la nidification de ces insectivores très voraces. « Un couple de mésanges peut par exemple avaler 18 000 insectes en une vingtaine de jours quand une chauve-souris est capable d’ingurgiter plusieurs milliers de papillons par nuit », détaille Brice le Maire dont la société est basée à Valence. L’enveloppe globale de cette expérimentation est d’environ 9000€ dont 80% est pris en charge par le syndicat et le reste par les vignerons. « On a lancé l’appel d’offres et on a reçu rapidement un retour enthousiaste des vignerons qui ont envie de montrer qu’ils peuvent avoir un impact positif sur la nature, prolonge Aurélie Pujol, la directrice de l’appellation. On aurait pu en poser encore plus mais on se laisse le temps de voir les résultats avant d’intensifier l’expérimentation. » C’est la société Agrinichoirs qui est chargée du suivi d’occupation via une géolocalisation précise et des contrôles réguliers. Dans la plupart des cas, la mécanique visée est la suppression des traitements. Mais pas seulement. « Chez nous, c’est plutôt pour ramener de la biodiversité, montrer que nos sols sont vivants, c’est une sorte de vitrine vertueuse pour les visiteurs mais aussi pour les promeneurs, conclut Romain Teissonnière. Le consommateur attend des gestes forts et nous lui en donnons au quotidien, c’est indispensable pour la pérennité des exploitations viticoles. » 

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