Irvin Charpentier nommé chef de caves du champagne Alexandre Bonnet

Irvin Charpentier prend la suite d’Alain Pailley pour diriger les vinifications d’Alexandre Bonnet. Terre de vins est allé rencontrer celui qui est peut-être le plus jeune chef de caves de la Champagne (il n’a que 30 ans !). Il nous a parlé de son parcours un peu atypique qui l’a conduit de la géologie à l’œnologie mais aussi des vendanges qui débuteront ce samedi dans ce domaine des Riceys.

Comment êtes-vous arrivé dans le monde du vin ?
Je voulais travailler dans la géologie mais je me suis rendu compte au bout de quelques années d’études que les débouchés étaient minces. Mes parents sont vignerons à Saulcy sur l’autre extrémité de la Côte des Bar, dans ce que l’on considère comme la petite Sibérie de ce terroir, à la frontière de la Haute Marne. J’ai fait mes premières vendanges quand j’avais dix ans. Après mon Deug de géologie, j’ai donc enchaîné sur une année de licence en sciences de la vigne puis sur le DNO à Dijon. J’ai réalisé mon stage au domaine de la Vougeraie sur la Côte de Nuits, l’occasion de m’initier à la vinification des blancs et aux élevages en fûts. Je suis ensuite rentré chez Alexandre Bonnet, où Alain Paillet m’a formé pendant cinq ans. 

Qu’est-ce que vous retenez de ce qu’il vous a transmis ?
Il m’a appris l’art de saisir le goût du rosé des Riceys au moment de la macération. Chaque viticulteur des Riceys choisit d’interrompre la macération à un moment différent. Je sais que certains préfèrent un rosé assez léger, nous, nous sommes plutôt sur quelque chose de plus extrait. Les parcelles des Riceys à partir desquelles nous le produisons se caractérisent par une aromatique de cerise burlat. Aussi, lorsque s’ajoutent l’amande fraîche et la fraise des bois un peu écrasée, pour moi, on y est.

Votre formation de géologue vous aide-t-elle au quotidien dans votre travail ?
Elle m’aide à décortiquer l’environnement où poussent les vignes. Je suis resté passionné par la géologie et je ne peux m’empêcher de continuer à ramasser les cailloux et à collectionner les fossiles !

Que représente aujourd’hui le domaine Alexandre Bonnet ?
Nous atteignons 100.000 bouteilles commercialisées. Mais pour le millésime 2022 nous avons réalisé un tirage de 250.000. Nous possédons 45 hectares sur les Riceys et aux alentours, plantés à 92 % de pinot noir. Nous sommes certifiés HVE depuis 2015 et nous menons des essais de conduite en bio sur la moitié de notre domaine, sans toutefois être encore entrés dans une démarche de conversion. Pour la première fois cette année, nous allons presser et vinifier ces vignes séparément pour mieux observer comment le vin se comporte en cave.

Comment se présente la vendange aux Riceys ?
C’est un millésime vraiment particulier. On est sur un record en termes de poids de baies pour le pinot noir. Les conditions de la floraison ont été optimales, toutes les fleurs ont été fécondées, nous n’avons pas eu de coulure, cela signifie que chaque fleur a donné une baie. On arrive ainsi à une moyenne champenoise qui bat tous les records historiques, avec un poids des grappes de 200 grammes, alors que l’année dernière on était à 120 g. Dans certains secteurs on va être à deux seaux par pied ! En revanche, la charge importante et l’entassement, mais aussi un mois de juillet qui a été assez arrosé, ont favorisé l’installation précoce de la pourriture. Ces conditions tropicales mêlant eau et chaleur sont un régal pour le botrytis. Mais comme les volumes sont importants, il en restera toujours assez après le tri. 

Avec cette charge, parvient-on à obtenir une belle maturité ?
Il faut être lucide, nous n’aurons pas 10,5 degrés naturels. Le fait d’avoir beaucoup de charge alors qu’en plus le feuillage n’est pas très dense crée un déséquilibre. On n’a pas assez de feuilles pour synthétiser tous les sucres qu’il faudrait dans les baies. L’idée, plutôt que d’attendre et que le risque sanitaire prenne une part plus importante de la récolte, est donc de cueillir à une maturité qui n’est peut-être pas très importante mais qui nous permettra de garder des vins frais. L’acidité non plus n’est pas très élevée. Une vague de chaud il y a quelques semaines a consommé l’acide malique et les dernières pluies ont dilué l’acide tartrique. 

www.alexandrebonnet.com

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