[PRIMEURS] Philippe Castéja : “On sent poindre un retour à la normale”

Décalée de quelques semaines, la campagne des primeurs approche à grands pas. Les principaux acteurs de cette mise en marché sont sur le pont. Parmi eux, Philippe Castéja, en sa qualité de président du Conseil des grands crus classés 1855. Entretien.

Pour commencer, faisiez-vous partie des personnes qui ont souhaité décaler cette campagne des primeurs à la fin du mois d’avril ?
Oui, je trouve que le choix du mois d’avril est une excellente idée. Et je vais vous en donner la raison : les vins se dégustent mieux en avril qu’en mars. On a eu le temps d’opérer un soutirage et un premier pré-assemblage. Nous en avons fait l’expérience l’année dernière à cause de la crise sanitaire. J’avais goûté les vins au début du mois de mars et puis, compte-tenu de l’annulation, nous avons goûté à nouveau en avril, c’est à ce moment que nous avons fait ce constat, les vins étaient différents.

Comment le Conseil des Grands Crus Classés 1855 se met-il en ordre de bataille ?
Le Conseil des grands crus classés accompagne cette campagne, plus qu’il ne l’organise. Il n’intervient pas de façon aussi importante que l’Union des Grands Crus par exemple. Toujours est-il, nous donnons un avis sur la tenue et nous faisons en sorte que les journalistes puissent déguster dans les meilleures conditions. Des opérations se feront dans des châteaux comme d’habitude avec des mesures de distanciation, un nombre de dégustateurs restreint dans un lieu et des crachoirs jetables par exemple. On organisera aussi pour des journalistes étrangers des envois d’échantillons.

Vous êtes également propriétaire et négociant, quels sont les grands enjeux pour ce millésime 2020 ?
Ce qui est notable, c’est que nous enchainons trois millésimes de très belle qualité, 2018, 2019 et 2020. Ainsi, ils sont les bienvenus dans un contexte mondial inédit. Heureusement que nous arrivons avec de très bons vins sur le marché. C’est très positif. Pour les prix, je ne peux pas vous dire à ce jour quelle sera la tendance. Chaque cru a sa politique. L’année dernière, nous nous sommes retrouvés dans un marché complètement traumatisé par ce qui nous tombait sur la tête. Tout le monde se cherchait. Les viticulteurs cherchaient leurs distributeurs, les distributeurs cherchaient leurs clients et les revendeurs cherchaient leurs clients aussi. On marchait à l’aveugle dans un état de panique mondial. Aujourd’hui, on est dans un contexte différent, on a l’expérience de l’année dernière et une perspective de sortie de crise.

C’est la campagne de l’optimisme…
Oui, car on sent poindre un retour à la normale avec des restaurants qui devraient rouvrir avant l’été, des avions qui vont redécoller et une campagne de vaccination qui semble s’accélérer. Donc, le marché se normalise, on se relève, on a pris un grand coup dans la figure, nous étions couchés, nous sommes désormais sur nos genoux et nous allons nous mettre debout. Je suis optimiste. Tout le monde a envie que ça redémarre. La levée momentanée des taxes a aussi un effet extrêmement positif : c’est un espoir, un geste, une lumière au bout du tunnel. Ça va déjà nous permettre de passer les 2018 qui étaient bloqués… Et il faut dire que le consommateur américain se réjouit également de la levée des taxes pour faire repartir la consommation des vins à des prix raisonnables.

Cet article [PRIMEURS] Philippe Castéja : “On sent poindre un retour à la normale” est apparu en premier sur Terre de Vins.

Château Ferrière : l’arbre en harmonie avec la vigne

Claire Villars-Lurton poursuit à château Ferrière, 3ème grand cru classé de Margaux, la mise en œuvre de ses idées novatrices et respectueuses de l’environnement en convertissant 2 hectares de vignes à l’agroforesterie.

Mais qu’est-ce que l’agroforesterie ? L’association française d’agroforesterie nous en donne une définition : « l’agroforesterie désigne les pratiques, nouvelles ou historiques, associant arbres, cultures et/ou animaux sur une même parcelle agricole, en bordure ou en plein champ ». Autrefois, il n’était pas rare de voir des arbres fruitiers (pêchers de vigne souvent, mais aussi poiriers) au milieu des rangs de vignes. Ceux-ci ont pratiquement disparu car ils rendaient le passage des engins difficile suite à l’avènement de la mécanisation. Et l’esprit était plutôt aux grands espaces ouverts, accessibles et en monoculture par souci de rationalisation. Mais la présence d’arbres au milieu des vignes était davantage une opportunité d’avoir des fruits qui servaient l’autosuffisance que la réponse à un souci écologique. Aujourd’hui, on sait que l’apport d’arbres en inter-parcellaire ou en intra-parcellaire, ainsi que la présence de haies, apportent des bénéfices à la vigne. Confidentielles à leurs débuts, les expériences menées depuis une vingtaine d’années se multiplient et n’en sont pratiquement plus désormais car elles sont intégrées pleinement au mode de culture en bio, la plupart du temps. De nombreux sites web relatent les retours d’expérience ou donnent maintenant des conseils bâtis sur l’analyse scientifique.

Cette pratique se répand dans le milieu viticole, mais reste encore bien minoritaire par rapport au modèle agricole conventionnel dominant. A Margaux, ce mode de culture fait des émules, comme au château Angludet il y a quelques temps, et maintenant à Ferrière.

Une plantation étudiée

Avant de se lancer à château Ferrière, Claire Villars-Lurton a expérimenté la conversion de 2 ha en agroforesterie en intra-parcellaire sur un vignoble de Haut-Médoc qu’elle possède sur la commune de Vertheuil. Elle précise : « on travaille avec Alain Canet », ingénieur agronome et agroforestier, directeur de Arbre et Paysage 32. Celui-ci conseille et donne un appui technique sur le projet. Claire décrit la plantation : « tous les 14 mères d’espaces (ou rang) on a planté une rangée d’arbres, et dans le rang de vigne concerné on a 4 pieds de vignes puis 1 arbre, et ainsi de suite ».

Trois types d’arbres ont été plantés :
• Des Fruitiers : pêchers, pommier, poirier, cerisier, poirier). Ils seront productifs et seront taillés comme les pieds de vignes.
• Des fruitiers à bois : noyer, poirier sauvage, merisier, cormier et de l’alisier torminal.
• Des arbres à trogne (appelés aussi arbres têtards et dont la forme résulte des tailles périodiques, afin de fournir du bois et du fourrage) : murier sauvage, charme, orme de Sibérie, érable champêtre.

Mais planter des arbres au milieu de la vigne ne va pas de soi au regard de la règlementation. Claire Villars-Lurton rassure : « l’INAO est d’accord pour cette expérimentation. Elle veut une densité de plantation de 6000 pieds /ha. Nous sommes actuellement à 10 000 pieds et même si on en perd du fait de la plantation d’arbres, on perdra moins de 10% de pieds ».
Ce dispositif s’accompagne d’une plantation de haies en périphérie, pour un coût certain. « Mais c’est surtout la main d’œuvre d’entretien qui va coûter car les haies et les arbres seront taillés à la main », précise Claire.

Pour quels bénéfices ?

Pour Claire Villars-Lurton, ce premier pas d’agroforesterie s’inscrit dans une démarche plus large et globale, et ceci bien qu’elle accepte de perdre un peu de surface en appellation Margaux pour la consacrer à l’agroforesterie. « Mon objectif, c’est de ne plus traiter. A Ferrière je veux faire un essai sur 2 hectares avec zéro traitement ». L’agroforesterie doit « rendre la vigne plus forte pour qu’elle puisse combattre la maladie par elle- même. Il faut recréer le poumon qu’est le sol, le rendre plus vivant. C’est parce que le sol sera plus vivant que la vigne sera plus résistante. Et une manière de rendre le sol plus vivant, c’est d’avoir un couvert végétal (crucifères, légumineuses, graminées), des haies et des arbres pour la biodiversité et la symbiose avec la vigne ».
Cette symbiose avec la vigne développe ce qu’on appelle la mycorhization. La mycorhize nait de la rencontre entre un champignon et d’une racine qu’il entoure. Cette association se traduit par un échange gagnant/gagnant. L’arbre fournit au champignon des sucres issus de la photosynthèse tandis que la mycorhize apporte à l’arbre des éléments nutritifs (azote, phosphore et de l’eau). Ces mycorhizes rendent la plante moins sensible aux agents pathogènes du sol et au stress hydrique.

Mais, outre l’amélioration de la biodiversité du sol par une mycorhization plus favorable, l’agroforesterie, lorsqu’elle est en périphérie de la parcelle de vigne, permet de freiner le passage de la maladie d’une parcelle à l’autre. Elle tempère aussi les excès du climat, permet une diversification de la production (fruits, bois), participe à la lutte contre les espèces ravageuses en favorisant la présence de leurs ennemis naturels qui trouvent dans l’arbre ou la haie l’habitat dont il ont besoin. Et puis, très tendance, l’agroforesterie stocke du carbone. Enfin, un avantage qui sera apprécié par l’œnotouriste, l’agroforesterie contribue à embellir le paysage.

Claire-Villars Lurton veut à l’évidence faire du vin avec de l’éthique, dans le respect de la nature et du consommateur. Cela a un prix mais ce n’est pas sa priorité. Une éthique qu’elle prouve aussi par l’accueil d’un apprenti dans le cadre d’un dispositif un peu particulier. C’est ainsi que grâce au collectif « Les Vignerons du Vivant » (Prix Spécial du Jury « Engagement Solidaire » en 2019, lors des Trophées Bordeaux vignoble engagés de Terre de Vins) Claire accueille au château Haut-Bages Libéral dont elle est aussi propriétaire (5ème cru classé de pauillac) un apprenti qui sera suivi par la fondation Apprentis d’Auteuil pour l’accompagnement psycho-social et dont la formation théorique sera assurée par la MFR (Maison Familiale et Rurale) de Saint-Yzans-de-Médoc. Claire Villars-Lurton reste discrète sur cette démarche de plus qui témoigne de son engagement désintéressé lorsqu’il y a du bien à faire.
Les propriétés de Claire Villars-Lurton (et celle de Gonzague Lurton, son mari, avec Durfort Vivens) apparaissent désormais comme des figures de proue d’une modernité repensée et vertueuse.

www.ferriere.com

Cet article Château Ferrière : l’arbre en harmonie avec la vigne est apparu en premier sur Terre de Vins.

Anne de Joyeuse lance le Château de Brasse dans le grand bain

En coopération avec la famille de Latude, la cave Anne de Joyeuse sort une nouvelle gamme AOP Limoux à travers la dénomination Château de Brasse. Un rouge et un blanc haut de gamme afin de capitaliser sur l’excellence d’un terroir.

Anne de Joyeuse et la famille de Latude ont un point commun : l’attachement viscéral au terroir de Limoux. C’est d’ailleurs cet amour pour ce vignoble atypique qui lie les deux entités depuis des années. Les de Latude font en effet partie des 350 familles de vignerons qui vendent leur raisin à la célèbre cave coopérative. « Cette coopération historique avec Anne de Joyeuse nous a conduit petit à petit vers l’excellence du travail de la vigne, explique Jacques de Latude, 35 ans, 11e génération du Château de Brasse. C’est tout naturellement que nous avons décidé de promouvoir, à travers la dénomination Château de Brasse, un AOP Limoux rouge et blanc. » La coopération est même dans leurs gênes puisque Pierre de Ginestous, le grand-père, fut président de la cave Sieur d’Arques pendant plus de 30 ans !

Brasse, un fleuron de la famille de Latude depuis 1720

Situé sur le terroir d’Autan, le Château de Brasse (180 hectares dont 62 de vignes) est tenu d’une main de maître par des femmes depuis quatre générations. Claude de Latude en a la direction mais elle devrait passer à la main à son fils, Jacques, d’ici 3 ans. « Brasse, c’est un fleuron de la famille depuis 1720, explique le jeune homme. A l’origine, on y cultivait des céréales, des oliviers et déjà de la vigne à l’époque gallo-romaine. L’emplacement permettait une irrigation idéale. L’Aude nourrissait une nappe phréatique grâce à laquelle la vigne pouvait traverser les périodes de sécheresse sans difficulté. Cette nappe est le trésor invisible de Brasse, dont chaque bouteille de vin se veut le digne dépositaire. » Un terroir propice où les parcelles se répartissent entre l’IGP Haute vallée de l’Aude dans la plaine où sont produits des vins rouges fruités, au goût de cassis, et des vins blancs floraux, et l’AOP Limoux sur les coteaux où sont produits des blancs plus minéraux et des rouges charpentés, très mûrs, aux notes d’épices et de violette.

« Un terroir d’exception où la terre y est plus riche, plus concentrée, plus dense »

C’est justement sur des parcelles en altitude (environ 250 m) que Jacques de Latude a voulu lancer ces fameuses cuvées. Une idée qui lui a germé en 2018. « Le principe c’est que chacun profite de l’image de l’autre : Anne de Joyeuse capitalise sur l’image historique et patrimoniale du château et nous profitons du dynamisme de cette cave et de son réseau de distribution très professionnel, ajoute-t-il. En plus, c’est le plus bel endroit de la propriété avec une vue plongeante sur toute la vallée de l’Aude. Mais c’est surtout un terroir d’exception où la terre y est plus riche, plus concentrée, plus dense, et où la vigne profite davantage de la lumière du jour et de la fraîcheur des nuits. L’amplitude thermique qui en résulte sied particulièrement au chardonnay et au pinot. » En outre, les marnes calcaires et argileuses apportent plus de structure et de complexité aux vins. Et parce que les coteaux sont aérés, la vigne à cet endroit n’a pas besoin des traitements. Brasse bénéficie globalement d’un climat chaud, sec mais ventilé, parfait pour la culture de la vigne.

Un caveau de dégustation et un circuit pédagogique en projets

Sur place, entre Limoux et Alet Les Bains, le cadre et le lieu, chargés d’histoire, donnent forcément des idées à la famille de Latude. L’œnotourisme est évidemment une piste de réflexion. « On a un projet de caveau de dégustation dans les anciennes écuries, détaille Jacque de Latude. On voudrait également proposer un circuit pédagogique autour des vins de la propriété mais aussi autour du patrimoine historique du château. » Peu de propriétés peuvent en effet s’enorgueillir de disposer d’un aqueduc, d’anciens moulins, d’une chapelle et d’une glacière (sous l’ancien régime et jusqu’à la fin du XVIIIème siècle, les propriétaires y conservaient de la glace issue de la neige des Pyrénées). Et tout cela au bord de l’Aude et au pied du Pic de Brau. Grandiose.

Les nouvelles cuvées en quelques mots
• AOP Limoux blanc (70% Chardonnay, 30% Chenin) : robe jaune paille, reflets argentés, notes florales et de fruits à chair blanche, gras, fraicheur et minéralité en bouche. Longueur qui laisse augurer un joli potentiel de vieillissement. A déguster avec des coquilles Saint-Jacques, un bar grillé ou un thon rouge mariné.
• AOP Limoux rouge (50% Merlot, 30% Syrah, 20% Cabernet-sauvignon) : robe aux reflets pourpres, soutenue et profonde, notes de fruits noirs et boisé très élégant, structure soyeuse et complexe, très bel équilibre. A déguster avec un magret de canard, une pièce de bœuf ou un dessert au chocolat.

Cet article Anne de Joyeuse lance le Château de Brasse dans le grand bain est apparu en premier sur Terre de Vins.