Champagne Lanson lance « Le Black Création » 

Parfois il suffit d’un mot pour que tout s’éclaire. En rebaptisant Le Black Label, Le Black Création, Lanson veut mettre en lumière toute la complexité de sa cuvée flagship et casser l’image générique des Bruts sans année, pour mieux souligner l’inventivité que nécessite la composition de ces multimillésimes.

La Maison Lanson fondée en 1760 a une histoire prestigieuse et un style marqué par la fraîcheur dont elle n’a jamais dévié. Lorsqu’elle a été rachetée en 2006, elle connaissait cependant quelques difficultés. Cette fraîcheur qui reposait sur le blocage des malos n’était pas toujours suffisamment patinée par le vieillissement qu’exige ce type de vinification. Elle souffrait aussi de l’image d’une maison tournée vers la Grande Distribution et le marché français.

Les trois familles champenoises actionnaires ont donc opéré un retour aux fondamentaux en procédant par ordre, c’est-à-dire en commençant par un travail sur les vins. Lorsqu’elles ont recruté en 2013 Hervé Dantan comme chef de caves, celui-ci a conditionné sa venue à l’acquisition d’un outil industriel lui permettant de gagner en précision. La Maison n’a pas lésiné, mettant sur la table vingt millions d’euros. De quoi constituer une nouvelle cuverie parcellaire et un chai à foudres. Lanson peut ainsi s’appuyer dans l’élaboration de ses multimillésimes sur plusieurs réserves perpétuelles, et une collection de vins de réserve rassemblant une vingtaine de millésimes depuis 2003. Hervé Dantan s’est aussi donné la liberté de réaliser une petite proportion de fermentations malolactiques (25% en 2022). « C’est une épice supplémentaire, cela permet apporte davantage de richesse, là où parfois nous avions un excès d’austérité. En revanche, nous ne l’employons pas sur les millésimés ».

A noter également le travail opéré sur le vignoble. La Maison bénéficie d’un approvisionnement de 420 hectares, dont 45 % de premiers et grands crus, alors que ceux-ci ne constituent que 33 % de la surface de l’appellation. En 2018, Lanson a été la première maison à lancer une structure collective d’accompagnement des vignerons, notamment vers les différentes certifications. « On ne peut pas se contenter d’attendre que le raisin arrive au pressoir et de constater s’il y a des défauts en disant au vigneron ce qu’il aurait dû faire, il faut conseiller en amont. » Nous avons pu déguster quelques vins clairs 2022 et constater leur qualité, notamment les chardonnays. Notre coup de cœur ? Trépail, où la maison possède un pressoir. Sur cette année solaire où l’acidité pèche un peu et où les arômes sont parfois très exotiques, ce cru se démarquait par sa fraîcheur, sa minéralité, et une expression plutôt sur les agrumes. « Ces chardonnays de la Montagne, dont l’austérité rebutait un peu autrefois, sont devenus un immense atout ».

En 2019, la Maison a enfin mis en place un vaste programme de repositionnement dont le nom de code Lvinvingt ou L2020, est un clin d’œil à la fois à la date et à l’objectif, celui de remettre les vins au centre. « Nous l’avons déployé en plein Covid, alors que nous n’avions rien à perdre. Les ventes s’effondraient, autant travailler à soigner notre repositionnement en prévision de la reprise » confie François Van Aal, le président. La Maison réduit le nombre de cuvées de 15 à 10, revoit la plateforme de marque, et crée notamment ce fameux Key Visuel mettant en scène la bouteille de Black Label portée avec amour, comme un nouveau-né, entre les mains du chef de caves. Au nom de la transparence, Lanson a aussi apposé des contre-étiquettes détaillées. Enfin, côté distribution, la Maison a opéré une large recomposition de son réseau d’importateurs notamment aux Etats-Unis et en Allemagne. 

© Jean-Baptiste Delerue. Nouvel espace de réception de la Maison qui accueille aujourd’hui 11500 visiteurs par an et devrait ainsi pouvoir augmenter son plafond à 16000 visiteurs.

Ce travail n’a pas tardé à porter ses fruits « Dès le deuxième semestre 2021 et surtout dès 2022 nous avons vu les expéditions augmenter de 40 % et notre chiffre d’affaires de 50 %. » Aujourd’hui, la grande distribution ne représente plus que 7 % des expéditions et l’export 85 %, avec comme premier marché l’Angleterre. Rappelons que Lanson s’est vu attribuer le Royal Warrant dès 1900 par la Reine Victoria. Outre-Manche, elle est aujourd’hui la deuxième marque la plus vendue derrière Moët & Chandon, et sa cuvée rosé arrive même en tête ! Cette position est confortée par son partenariat avec le tournois de Wimbledon qui dure depuis 1977 et pour lequel elle vient de resigner il y a deux mois à peine pour cinq ans. De quoi réjouir de là où il est Victor Lanson qui avait rebaptisé en 1937 son multimillésime du nom de Black Label en hommage à ce marché.

Le Black Création : un nouveau concept ?

Dernier jalon de cette révolution feutrée, la transformation du Black Label en Black Création. L’idée selon François Van Aal, est là-encore d’être plus transparent. « On a tendance à penser que les bruts sans années sont des produits génériques, la Maison veut ici souligner que tous les ans, l’assemblage est une nouvelle création. » Certes, Lanson cherche à reproduire le même style, mais la base vendange est toujours spécifique, et il faut s’adapter. Chaque édition, désormais numérotée, a ainsi ses propres nuances. Afin de donner tous les détails de ces créations, de pouvoir mieux les comprendre et les comparer, la contre-étiquette est désormais dotée d’un QR Code. On préfèrera par ailleurs le terme multimillésimes à celui de Brut sans année, dont la préposition négative « sans » donne justement une image illusoire de vin standardisé. La Maison inscrit ainsi ses pas dans ceux de Jacquesson, Krug et Roederer…

La 257ème édition qui arrivera sur les marchés en septembre nous a beaucoup séduite. Constituée à partir de la base 2017 et intégrant 45 % de vins de réserve, elle présente un profil élégant avec des notes de pêche, d’abricot, d’agrumes frais et de frangipane. Le vin a une belle fluidité, de la fraîcheur, mais sans agressivité. La Maison qui possède une œnothèque fantastique remontant à 1904, nous a donné l’opportunité de goûter quelques anciennes éditions. La n° 200 (base 1979), nous a éblouis. Malgré le temps, le vin ne s’est pas alourdi d’arômes de champignons, mais s’est juste enrobé d’une pointe de moka, de noisette et de vanille, tout en gardant une belle vivacité qui s’exprime sur des notes de citron confit et d’orange amère.

Terre de vins aime : Le Black Création 257. Prix 34 €. Disponible sur la boutique en ligne.

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