Fils de Jean-Marc, il a su se faire un prénom en militant pour des pratiques bio et biodynamiques et adopte progressivement une viticulture régénérative dans ses vignes.
L’aventure familiale est née entre Saint-Bris-le-Vineux côté maternel et Chablis côté paternel, là où il y avait le plus de potentiel dans les années 70 comme le rappelle Julien, le fils de Jean-Marc Brocard, l’un des principaux vignerons chablisiens. Il a rejoint le vignoble après une formation d’ingénieur dans l’industrie, d’abord pour aider aux vendanges en 1997 et il n’est plus reparti. « J’aimais travailler dehors et rester ici a été une évidence ». Il a démarré avec une dizaine d’hectares de son grand-père à Saint-Bris; il va, en 20 ans, en planter une centaine. Il est désormais à la tête de 200 hectares en Chablis, Petit Chablis et 25 hectares de premiers et grands crus, mais il a surtout créé sa propre gamme de vins en biodynamie sur son vignoble de Préhy.
Lutter contre la culture du « cid »
Julien, aujourd’hui la cinquantaine, s’est d’emblée penché sur la viticulture bio puis en biodynamie. « Le plus difficile a été de faire comprendre la démarche à la génération précédente. Mon père était contre et parlait de secte avec ses copains; il a mis dix ans à l’accepter avant de s’en approprier le mérite quand les vins ont commencé à bien se vendre. On vient de la culture du « cid », herbicides, pesticides, fongicides… qui s’occupe d’abord des symptômes plus que des causes alors que le remède est rarement loin du problème. La biodynamie n’est pas seulement une question de préparations ; elle apporte surtout une conscience et aide à comprendre les sols, les parcelles, les vents, le vivant. Aujourd’hui, je trouve que mes vins ont plus de finesse, de pureté et d’harmonie même si il faut beaucoup lutter contre les attaques de mildiou ».
Le retour des arbres
Une soixantaine d’hectares ont été convertis en bio à partir du début du siècle; aujourd’hui 120 hectares sur six domaines (sur les 13 de la maison).
Le vignoble est en phase de renouvellement. Julien Brocard en redessine les parcelles pour éviter les grandes masses de monoculture et recréé un écosystème vivant. Il s’attache à replanter des lignes d’arbres et des haies y compris en milieu de parcelles pour redévelopper la mycorhization et récupérer de l’humidité dans les sols. Des trognes d’arbres sont également laissées en bordure de parcelles.
« Le bio est déjà un gros défi dans une région où il pleut beaucoup. Mais la plus grande difficulté est de lutter contre les sécheresses estivales qui s’allongent avec des effets accrus quand il pleut sur des sols trop secs sans arbres ». Pour lutter contre le tassement des sols, il a acheté des tracteurs plus légers et replanter entre les ceps des couverts végétaux. « La difficulté réside surtout dans le recrutement de la main d’oeuvre, en particulier des tractoristes » avoue-t-il.
Une gamme éponyme
Julien s’est désormais fait un prénom. La gamme Les sept lieux en biodynamie, coiffée d’une capsule de cire corail sous son nom, compte actuellement sept références, du Petit Chablis au grand cru Les Preuses en passant par les premiers crus Côte de Lechet, Vau de Vey et Montée de Tonnerre, uniquement en parcellaires sur ce terroir de kimmeridgien. La première cuvée issue de La Vigne de la Boissonneuse sera officiellement certifiée Demeter pour le millésime 2022 (29 €). La dernière baptisée La 7ème est un chablis nature (30 €). « Mon objectif est de tout passer en biodynamie d’ici cinq-sept ans à condition d’arriver à le financer avec quelques récoltes à volumes. Pour ça, il faut avoir les reins solides en trésorerie et adopter un rythme plus lent en vignes. »
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