Costières de Nîmes : cap sur le développement durable

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La nouvelle équipe dirigeante, avec Bernard Angelras (président) et Aurélie Pujol (directrice du syndicat), a effectué sa rentrée en abordant tous les thèmes qui font son actualité.

La page des vendanges tournée, la nouvelle équipe à la tête des Costières de Nîmes a décidé d’entrer dans l’arène médiatique afin d’évoquer l’actualité de l’appellation. Et pour Bernard Angelras qui revient à la présidence et Aurélie Pujol directrice du syndicat depuis le 1er septembre trois axes essentiels ont été soulignés : « comprendre les besoins, imaginer des solutions et convaincre de leur bien-fondé ».

Mais avant d’évoquer le futur, quelques chiffres ont permis d’établir un point de situation à l’instant T. Globalement d’abord avec pour l’exercice 2020-2021, une baisse de la production de 14% et des stocks de 27% alors que les sorties de chais connaissaient un léger rebond (+4%). « La campagne de distillation à hauteur de 65.000 hl sur les deux années précédentes a permis d’assainir la situation. Côté export, les marchés britanniques et chinois ont connu un ralentissement des achats mais une reprise s’est dessinée ces derniers mois, notamment aux USA avec la fin des taxes Trump et un prix moyen de 14,99 $ la bouteille. Enfin, si les ventes ont souffert sur les marchés moins valorisés de la grande distribution une évolution positive s’est dessinée sur d’autres plus intéressants… »

Concernant la récolte 2021, la gelée d’avril a eu des conséquences sur les volumes. « En revanche l’état sanitaire était bon et va assurer la qualité des produits. Ce millésime sera favorable aux blancs grâce à de très beaux équilibres alors que les rouges offriront élégance et finesse avec des degrés en baisse », résumait Michel Gassier du château de Nages.

Protéger l’environnement et les terroirs

Des orientations évoquées pour le futur on peut retenir deux grandes lignes. Portée par Bernard Angelras, l’une s’est fixée pour objectif de contribuer à l’atténuation du changement climatique. « Nous souhaitons transposer à l’échelle des Costières les conclusions du rapport remis au ministre de l’Agriculture fin août. Nos vignerons peuvent apporter leur contribution dans le cadre d’abord de l’adaptation à l’évolution du climat par nos pratiques et nos conditions de production. Cela pourrait se traduire par l’intégration au cahier des charges de l’appellation de nouveaux cépages. Nous sommes déjà dans une phase d’expérimentation avec, par exemple, pour les blancs le croisement avec des cépages grecs. Les méthodes culturales peuvent atténuer ce dérèglement avec l’enherbement de nos terres de façon raisonnée et, grâce à nos vignes elles-mêmes, nous pouvons stocker du carbone dans nos sols. Des pratiques auxquelles nos vignerons sont sensibilisés depuis plusieurs années. »

Aurélie Pujol veut, pour sa part, faire de la protection des terroirs son cheval de bataille. « Les protéger, c’est les défendre afin de ne pas perdre notre potentiel de production et ses paysages qui sont porteurs d’image pour l’appellation ! Chaque hectare perdu l’est définitivement. Le territoire des Costières subit une forte pression foncière, il y a donc de vrais enjeux et c’est pour cela que cette mission de protection est essentielle. »

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Découverte de Yavné : l’œil de Matthieu Poux, professeur d’archéologie

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Le monde de l’archéologie est en émois suite à l’exhumation d’un ancien site de vinification datant du VIe siècle à Yavné en Israël capable de produire près de deux millions de litres par an. Pour mieux comprendre l’impact de cette découverte sur la recherche actuelle, Terre de vins est allé rencontrer Matthieu Poux, professeur d’archéologie à l’Université de Lyon II.

Avait-on déjà découvert des sites de production aussi importants ?

Tout dépend où. En Israël, à ma connaissance non. La plupart des sites étaient des petites unités de production familiales comme sur tout le pourtour de la Méditerranée. En Gaule romaine, en revanche, il y existait de véritables « châteaux vinicoles » qui pouvaient compter jusqu’à cinq pressoirs comme ici. Ce qui frappe aussi lorsqu’on observe les photos aériennes, c’est qu’il y a sans doute plusieurs états de construction superposés, plusieurs bâtiments qui se sont succédés. On peut donc penser que c’est une installation qui a perduré assez longtemps. À la fin de l’Antiquité, cette région a continué à produire beaucoup de vin. Il était exporté dans des jarres allongées très caractéristiques appelées « amphores de Gaza », dont on retrouve des restes dans tout le bassin méditerranéen, y compris en Gaule.

Le site comprend en effet de nombreux fours et ces amphores étaient produites sur place, comment expliquez-vous la survie de ce mode de conservation, alors qu’à la même période en Gaule le tonneau se généralisait ?

Les amphores étaient principalement destinées à l’exportation. Elles étaient à usage unique et ne coûtaient pas cher à produire puisqu’on avait seulement besoin d’argile, une matière première facile à trouver, et de main-d’œuvre, en sachant qu’à l’époque on recourait massivement aux esclaves. Pour les circuits courts, on utilisait plutôt l’outre et le tonneau. En effet, compte tenu du coût de production beaucoup plus élevé d’un tonneau qui nécessite tout un savoir-faire, il devait pouvoir être réutilisé et donc rapatrié. Le développement en Gaule de l’usage du tonneau à partir des IIIe et IVe siècles est d’ailleurs en partie lié au fait qu’à la fin de l’Empire, la production de vin est à usage de plus en plus local. Au Moyen-Orient au contraire, le commerce à longue distance a perduré plus longtemps, parce que la région a été moins touchée par le déclin économique et les invasions barbares. De grandes entreprises comme celle de Yavné ont donc pu se maintenir et avec elles, les exportations de vins et l’utilisation des amphores que l’on retrouve jusqu’au Moyen-âge.

A quoi ressemblait le vin de Gaza ?

C’était probablement un vin blanc ambré, très sucré, liquoreux ou au contraire, très oxydé, au parfum de résineux, à l’instar d’une majorité de vins antiques. Il pouvait vieillir pendant plusieurs décennies. Comme bien des vins grecs ou orientaux, il était considéré comme très qualitatif et se vendait relativement cher.

Dans l’Antiquité, il existait déjà différents types de vins pour différents types de consommateurs ?

Oui, tout en bas de l’échelle on trouve la posca, un vin de soif ordinaire qui se buvait rapidement, sous forme de vinaigre mêlé à beaucoup d’eau pour en atténuer l’acidité. Inversement, il permettait d’aseptiser l’eau. On l’aromatisait parfois avec du miel pour faire passer le goût. Cette vente de masse pouvait être produite par des vignobles de grande superficie. Mais il y avait aussi des crus millésimés, exportés à prix d’or dans toutes les provinces de l’empire romain.

Nos ancêtres ne connaissaient pas les sulfites, comment expliquez-vous qu’on arrivait déjà à obtenir des vins qui se conservaient aussi longtemps ?

On ne connaissait pas la pasteurisation, mais on chauffait parfois les vins pour mieux en maîtriser la fermentation et le vieillissement. L’un des enjeux majeurs résidait dans l’étanchéification des jarres avec de la poix, pour éviter les fermentations spontanées. Il existait aussi toutes sortes d’additifs visant à ralentir la dégradation du vin : le plâtre ou le sucre, pour en atténuer l’acidité, le fénugrec, qui était une plante aux propriétés antiseptiques…. Mais dès lors que le vin tenait l’année, qu’il survivait à l’hiver, il pouvait se conserver des années, voire des décennies, et même jusqu’à plus d’un siècle selon les textes. Déjà dans l’Odyssée, il est question de vins vieillis qui attendent le retour d’Ulysse dans la chambre aux trésors de son palais.

Les vins de Gaza étaient très réputés, mais la taille du site semble montrer que leurs volumes étaient conséquents et qu’ils n’étaient pas si rares ?

Ce sera aux fouilleurs de le déterminer. Ce qui est certain, c’est que la référence absolue en matière de vins dans l’Antiquité, c’est le bassin égéen, les îles grecques, les côtes du Proche-Orient, l’Asie mineure, la Turquie actuelle : pour un amateur de vin romain, cela représentait l’équivalent du Bordelais ou de la Bourgogne de nos jours. Les bons vins, les plus prisés, les plus coûteux, les plus appréciés de l’aristocratie viennent en grande partie de cette région. Ce qui explique qu’on y a plutôt affaire habituellement à des installations de taille moyenne. Or, à Yavné, c’est tout à fait massif. Cela montre que profitant de cet engouement pour les vins de la région, certains entrepreneurs ont aussi réalisé de gros investissements, y compris dans l’Antiquité tardive. Cela n’a rien de surprenant, l’empire byzantin où se trouve Yavné se situait dans la droite ligne de l’empire gréco-romain, on y consommait beaucoup de vin au quotidien, lors des fêtes religieuses et aux banquets. Cette consommation de vin perdure même dans les premiers temps de l’Islam. Il a été retrouvé en Égypte des tessons d’amphore peints, appelés ostraca, avec des commandes de vin passées par un calife local au VIIe siècle. Dans le Coran lui-même, on promet au paradis des ruisseaux de vin. Sa prohibition est plus tardive et n’est mentionnée que dans les hadiths.

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